Héraldique du Calcio

Heraldique du Calcio (1928)

PRESSE – En 1928, le dessinateur italien Carlo Bergoglio redéfinit à la une du Guerin Sportivo l’identité visuelle des clubs italiens en leur attribuant une héraldique teintée d’humour. De nombreux clubs conserveront la symbolique.

Lorsqu’il publie sa une du 10 octobre 1928, le Guerin Sportivo n’imagine sans doute pas qu’il va provoquer une petite révolution dans certains clubs de football italiens, et non des moindres.

Le zèbre et le diable

Sur cette une sont dessinés des écussons fantaisistes représentant chacun un club du championnat italien, avec un personnage emblématique ou un animal symbolique. L’article a pour titre “L’héraldique du football” et il est l’œuvre, texte et dessins, de Carlo Bergoglio, plus connu sous le nom de Carlin, lequel est journaliste et dessinateur (et accessoirement écrivain).

Le Guerin Sportivo est l’un des tous premiers journaux de l’histoire entièrement consacré au football. En septembre 1928, il avait déploré que de nombreuses équipes du championnat manquaient d’une identité forte. Elles ne se distinguaient qu’avec la couleur du maillot, mais il leur manquait un symbole fort, quelque chose qui marque les esprits.

Le journal demanda ainsi à ses correspondants de déterminer pour chaque club, avec l’aide des supporters et des habitants, un animal symbolique ou un personnage emblématique. Lorsqu’il reçu les propositions, Carlin se mit au travail.

C’est ainsi que le FC Torino, alors champion d’Italie en titre, adopte le taureau symbole de la ville piémontaise, tandis que la Juventus se voit attribuer un zèbre, dont le pelage se rapproche du maillot bianconeri.

L’Internazionale, alors renommé Ambrosiana, adopte le biscione, créature mythique de la cité lombarde, tandis que le Milan FC (futur AC Milan) se voit attribuer le personnage du diable. A la création du club, en 1899, son fondateur Herbert Kilpin avait justifié les couleurs rouge et noire du maillot pour leur aspect diabolique.

L’AS Roma quant à elle se voit attribuer la fameuse louve affublée des deux bébés, futurs créateurs de la cité romaine, Romulus et Remus. L’Atalanta de Bergame quant à elle est représentée par la déesse qui a donné son nom au club.

Le grizzli d’Alexandrie

Vingt-huit des trente-deux clubs de l’élite du football italien se voient ainsi attribuer un animal symbolique ou un personnage emblématique. Ce qui n’était à priori qu’un jeu va s’avérer déterminant dans l’histoire du Calcio. Car de nombreux clubs adopteront officiellement l’emblème imaginé par Carlin : le zèbre de la Juventus et le diable de l’AC Milan sont aujourd’hui encore des symboles des clubs, et font même figure de mascottes.

L’US Alessandria se voit attribuer un grizzli, parce que l’équipe joue en gris (Grizzli se traduit l’orso grigio en Italien, littéralement l’ours gris). Dans ses premiers dessins, l’ours était coiffé d’un borsalino, un chapeau fabriqué à Alexandrie. L’ours est resté un symbole très fort du club piémontais : Les joueurs sont surnommés les grizzlis et la mascotte est un ours gris.

L’US Bari est symbolisé par un coq. L’origine est beaucoup plus incertaine et serait le résultat d’une enquête menée auprès des habitants par le journaliste Alfredo Bogardo. Le coq aurait été préféré à d’autres oiseaux pour la tenue des joueurs, blanche avec un col rouge qui fait irrésistiblement penser à la crête d’un coq blanc. Le coq est apparu sur l’écusson du club en 1979.

Le Calcio Padova est symbolisé par la poule de Padoue, une race de poule reconnaissable à sa huppe très fournie. Le club de Pro Patria se voit attribuer un tigre, à cause de son maillot à bandes horizontales qui font penser au pelage du tigre. Livourne est représenté par un poisson mullidae, ou rouget (Triglia en Italien). Modène est représenté par un canari (l’équipe joue en jaune).

L’AC Vérone, futur Hellas Vérone, est représenté par Mastino II Della Scala, le condottiere de la famille régnant sur la ville dont les armes sont représentées par une échelle (scala en italien).

Symboles oubliés

Toutefois, certaines créations de Carlin n’ont pas résisté à l’épreuve du temps. Ainsi pour le AC Napoli, le dessinateur avait choisi la figure du scugnizzo, le gamin de rue napolitain popularisé par le poète Ferdinando Russo. Mais le club avait déjà choisi son symbole, le Corsiero del sole, le cheval de la ville de Naples (Par la suite, ce cheval se transformera en âne).

Pour le Bologne FC avait été choisi un personnage de la commedia dell’arte, le docteur Balanzone, provenant de Bologne mais personnage plutôt négatif. Pour la Fiorentina, Carlin avait imaginé un grillon, lequel n’a pas résisté au lys rouge de la ville de Florence. Pour le Lazio Rome, sa proposition d’un buffle n’a pas tenu la distance face à l’aigle en usage depuis la création du club.

Quatre clubs ont été oubliés : l’US Triestina, le Prato SC, l’US Cremonese et l’AC Reggiana qui n’ont pas inspiré le dessinateur.

Plus tard, d’autres clubs s’inspireront de cet héraldique de Carlin pour créer leur propre personnage symbolique, à l’image du Satanelli de Foggia ou le Baciccia, marin de Gènes, pour la Sampdoria.

Aujourd’hui, la plupart des mascottes des clubs du Calcio sont directement inspirées de l’héraldique du Guerin Sportivo.

A propos de Carlin, du Guerin Sportivo et de l’héraldique du football italien

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