HISTOIRE D’UN MAILLOT – Dans les années 2002-2004, la firme allemande Puma habilla les Lions Indomptables du Cameroun. Avec beaucoup d’originalité, mais aussi quelques ennuis à la clé.
Photo : Puma.
La compétition qui oppose les équipementiers du foot pro est à peine moins virulente que celle des championnats les plus prestigieux. Fournir une tenue à une équipe est un marché sur lequel se battent les plus grandes marques, à commencer par les plus puissantes d’entre elles, Nike et Adidas.
Effet de manches
Éternelle troisième, la firme Puma est parvenue à se faire un nom en inventant des maillots inédits pour les équipes qu’elle sponsorise. En 2000, elle crée un maillot moulant pour l’équipe nationale italienne, idée qui sera reprise par la suite par de nombreux équipementiers, les joueurs et les arbitres voyant dans cette tenue une bonne façon d’en finir avec les tirages de maillots.
En collaboration également avec l’équipe nationale du Cameroun, la firme allemande laisse toujours parler son imagination, où son mauvais goût selon certains. La saga commence lors de la Coupe d’Afrique des Nations 2002. Les Lions Indomptables du Cameroun, tenants du titre et futurs vainqueurs de l’épreuve, font sensation avec un maillot dénués de manches. “Nous avons lu les règlements en long et en large, affirment les patrons de la firme allemande, et aucune règle ne précise si les maillots doivent porter des manches ou non…“.
Pourtant, quelques mois plus tard, lors de la Coupe du Monde en Corée, la FIFA (Fédération Internationale de Football) fera interdire aux joueurs camerounais d’enfiler ce maillot. Raison officielle : “Tenue non conforme“. Raison officieuse : La FIFA met son emblème sur les manches de toutes les équipes participant à l’épreuve. Puma trouvera un habile compromis en ajoutant rapidement des manches noires.
Maillot une pièce
Deux ans plus tard, lors de la Coupe d’Afrique 2004, Puma et l’équipe du Cameroun font de nouveau parler d’eux. A défaut de remporter une troisième C.A.N. d’affilée, les Lions Indomptables adoptent une tenue révolutionnaire : l’UniQT, une combinaison short-maillot d’une seule pièce qui s’enfile par le bas et se ferme au dessus des épaules.
Bien sûr, la très conservatrice F.I.F.A. a de nouveau crié au loup, demandant l’interdiction de cette tenue. Et s’est appuyé cette fois sur les lois du jeu qui indiquent clairement que “l’équipement de base de tout joueur comprend : un maillot ou chemisette, des culottes (…), des chaussettes, des protège-tibias et des chaussures… “.
Sous la menace d’une sanction, un arrangement est adopté à la hâte : Les Lions disputent le premier tour de la CAN avec l’UniQT, mais reviennent à une tenue plus traditionnelle à partir des quarts de finale. Or, lors de ces quarts de finale, le scandale éclate : Les Camerounais portent toujours leur tenue interdite. “Nous n’avons pas eu le temps de préparer une autre tenue” prétextent les dirigeants. Peu importe, puisque le Cameroun sera battu et éliminé de la CAN.
Six points de sanction
L’affaire aurait dû en rester là, mais c’était compter sans la persévérance de la FIFA. Le 16 avril 2004, la commission de discipline de la FIFA inflige à la Fecafoot (Fédération Camerounaise de Football) une amende de 200.000 francs suisses (128.900 euros) et surtout six points de pénalité à l’équipe du Cameroun pour les éliminatoires de la Coupe du Monde 2006. Tombé dans un groupe comprenant l’Égypte, la Côte d’Ivoire, la Libye, le Soudan et le Bénin, où seul le premier est qualifié pour la Coupe du monde, le Cameroun débute les éliminatoires avec un handicap insurmontable.
Cette décision, confirmée le 12 mai par la Commission d’appel de la FIFA, a évidemment fait du remou. Plusieurs pétitions ont été lancés par pour demander à la FIFA de retirer cette sanction. De plus, des bruits de couloir ont laissé entendre qu’au delà d’une affaire de chiffons, le patron de la FIFA Sepp Blatter a profité de cette affaire pour affaiblir Issa Hayatou, le président camerounais de la C.A.F. (Confédération Africaine de Football) et candidat à la présidence de la Fédé Internationale…
Selon que vous serez…
Le 20 mai 2004, les cinquante-deux pays membres de la Confédération africaine de football demandent une sorte de grâce présidentielle à la FIFA après avoir entendu les arguments du président de la Fécafoot Iya Mohamed. Sepp Blatter répond qu’une grâce n’est pas prévue par les statuts de la FIFA, et que seul le congrès pouvait prendre une telle mesure.
Ce congrès de la FIFA, cinquante-quatrième du nom, a lieu le lendemain à Paris, le 21 mai 2004. La veille s’est déroulé au Stade de France un match France-Brésil (0-0) où la FIFA, qui fêtait son Centenaire, avait demandé aux joueurs… de porter des maillots datant d’il y a un siècle. Ainsi la fantaisie dans les tenues serait-elle autorisée ?
Le congrès du 21 avril décide à l’unanimité (et “sur proposition de Sepp Blatter“, précisera le communiqué) de lever la sanction des six points. Tout le monde est content : La FIFA et son président ont soigné leur image, le Cameroun garde toutes ses chances de qualification pour la Coupe du Monde 2006. Et la firme Puma se frotte les mains pour l’énorme publicité que lui a procuré cette affaire.
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