FILM – Le film “La dream team” (2016) de Thomas Sorriaux aurait dû être une sympathique comédie avec le football comme toile de fond. Finalement, c’est un film raté, mais le ballon rond n’y est pas pour grand chose.
L’art, c’est bien connu, est difficile, et la critique est facile. Nous préférons souvent faire l’impasse sur un mauvais film, une mauvaise chanson, un mauvais livre, plutôt que noircir nos pages d’un torrent de critiques. Mais il est parfois nécessaire de s’arrêter un instant sur des œuvres ratées, car elles portent de nombreux enseignements sur le traitement de notre jeu favori dans l’art.
Déjà, le titre…
Le film en question s’appelle “La Dream Team” et rien que le titre donne une première idée sur le caractère bâclé de l’œuvre. Un peu comme “Les seigneurs” ou les titres forts usités tels “Carton jaune” ou “Le match de leur vie”. Le film, écrivions-nous, a été réalisé par Thomas Sorriaux, un réalisateur qui a percé avec les films de Michael Youn. Il est sorti dans les salles en mars 2016, quelques semaines avant que la France n’organise le championnat d’Europe.
Le pitch avait du sens à défaut d’être original. Un coach se retrouve à entraîner une équipe de bras cassés et parvient à en faire une formation de bon niveau. Le coach en question est une vedette du foot en disgrâce, à qui son agent demande de se faire oublier en se mettant au vert dans un village perdu. Nous ne sommes pas loin, à nouveau, des Seigneurs d’Oliver Dahan.
Le casting à de la gueule, avec Medi Sadoun dans le rôle principal, Chantal Lauby dans celui de l’agent du joueur et Gérard Depardieu dans celui du paternel, preuve que le réalisateur dispose d’un bon budget.
Le générique est une réussite. Il résume en accéléré la carrière du joueur à travers des images de match entrecoupées de manchettes de presse (procédé également utilisé dans Les Seigneurs, on n’en sort pas). On découvre que le dénommé Maxime Barroll a joué à l’AS Roma avant de revenir au Paris Saint-Germain période Qatar. Taxé de “nouveau Cantona“, on découvre un type arrogant, une caricature des footballeurs que l’on aime détester (pas vraiment Cantona, donc). L’acteur s’incruste dans les images de match du PSG, où apparaissent Edison Cavani et l’entraîneur Laurent Blanc.
Le PSG, encore…
Bon. Encore et toujours le PSG. Depuis que le monde du foot professionnel est un sujet à la mode dans le cinéma français (grosso-modo depuis “Didier” d’Alain Chabat en 1997), c’est toujours le Paris Saint-Germain qui joue le rôle du grand club. Dans les années 1990, le club de la capitale était investi par la chaîne Canal Plus qui était également productrice de nombreux films. Le lien était donc évident. Depuis, il n’a jamais été rompu. Sans doute par simple parisianisme. Probablement aussi parce qu’il est plus facile de se moquer d’un club ultra-médiatisé. Peut-être aussi parce que les clubs de province ont pour la plupart quelque chose d’atypique qui pourrait écraser le sujet du film (encore que cette théorie soit démontée par “La surface de réparation” de Christophe Gérin).
Bref. Le film démarre sur les mésaventures de notre footballeur honni qui se fait embarquer sa voiture mal garée tout en apprenant qu’il ne sera pas sélectionné pour l’Euro. L’occasion d’entendre d’une hilarante imitation de la voix de Didier Deschamps. Puisqu’on vous dit que ça démarre bien. La suite du film, malheureusement tombe dans le convenu. On y confronte l’univers du foot professionnel à celui du foot amateur, l’arrogance bling-bling aux valeurs du terroir, le monde de la ville à celui de la campagne. Le joueur en disgrâce revient malgré lui dans son village natal et loge chez son père avec qui il ne parlait plus depuis une quinzaine d’années.
Le joueur est chargé de prendre en main l’équipe locale, une formation de gamins pas très doués qu’il entraîne sans enthousiasme. Selon un scénario cousu de fil blanc, le joueur s’attendrit avec les gamins à qui il enseigne “la gagne” à sa façon, tout en simulations et en coups défendus. Inévitablement, débarque la scène classique où au détour d’une rue, l’entraineur repère un gamin qui jongle avec un ballon et insiste pour l’intégrer dans son équipe. Le cinéma entretient toujours cette idée reçue selon laquelle un type qui jongle est forcément un bon footballeur.
Quelques bonnes raisons
Bref, les clichés ne manquent pas, c’est même un best-of. Des premières minutes grossièrement parodiques on est passé à la comédie un peu mièvre, comme si le film était passé aux mains d’un autre réalisateur en cours de route. Mais on trouve quelques bonnes raisons de poursuivre le visionnage : Le personnage d’agent à la fois cynique et naïf magnifiquement interprété par Chantal Lauby. Le chien qui s’appelle Platini. Les caméos de sportifs de renom (Sébastien Chabal, Renaud Lavillenie, Nikola Karabatic…). La réplique du personnage joué par Depardieu qui se moque de la Russie, pays dont l’acteur à choisi la nationalité dans un immense tollé trois ans plus tôt…
Puis arrive la dernière partie où le film s’écroule dans le surréalisme. L’équipe dispute la finale régionale contre le voisin honni. Allez savoir pourquoi, on voit débarquer Guy Roux et Christian Jeanpierre, lesquels viennent commenter la rencontre. Comme si la finale d’une compétition de campagne pouvait mobiliser les grandes chaînes de télévision. Une incrustation vidéo présente l’équipe façon jeu vidéo FIFA. Le match peut être suivi à la radio. On tombe alors dans une autre forme de parodique. A croire encore qu’un autre réalisateur a pris les commandes et s’ingénie à bousiller le travail des deux autres.
C’est le gros problème de “La Dream Team” que d’avoir voulu mélanger les genres, sans trop savoir s’il fallait pencher du côté de la comédie familiale ou celui de la parodie potache. On termine en outre par un scénario hyper-convenu (oui, on va vous raconter la fin) : L’équipe est menée au score par son adversaire (qui porte le maillot noir de l’équipe d’Allemagne – mais pourquoi donc ?). Elle revient miraculeusement à égalité. Puis il y a l’inévitable pénalty de la dernière minute, accordé aux adversaires et que le gardien remplaçant arrête façon Isabelle Nanty dans le “Trois zéros” de Fabien Onteniente.
N’en jetez plus. “La Dream Team” de Thomas Sorriaux, film raté, baclé, négligé, concentre toutes les tares du mauvais film de foot. Il y a pourtant quelques points positifs, et c’est peut-être ça qui nous fait vraiment regretter ce ratage. On n’a même pas envie de le revoir.
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