Chostakovitch, l’âge d’or du foot communiste

L'Âge d'Or de Dmitri Shostakovitch

BALLET – “L’Age d’Or” (1928) du Soviétique Dmitri Chostakovitch est un ballet racontant l’histoire d’une équipe de foot russe voyageant en territoire occidental.

Le sport a toujours occupé une place prépondérante dans la propagande de l’ancienne URSS (1917-1990), y compris le foot, très présent par exemple dans les œuvres des peintres Aleksandr Deïneka et Youri Pimenov. La musique classique n’est pas en reste avec les ballets d’Igor Moisseïev et Dmitri Chostakovitch.

Zenith Leningrad

Ce dernier, en plus d’être une figure majeure de la musique classique russe du vingtième siècle, était un amateur de ballon rond. Un vrai. Il se rendait à chaque match au stade de Leningrad (ancienne Saint-Petersbourg) pour encourager le club de la ville, le Dynamo puis le Zenith. Il s’y comportait, dit-on, comme un supporter très passionné, hurlant et gesticulant à la moindre action. Il aurait par ailleurs obtenu un diplôme d’arbitre, mais ne dirigea jamais la moindre rencontre.

Dmitri Shostakovitch
Dmitri Chostakovitch

Dmitri Dmitrievitch Chostakovitch (1906-1975) aimait tant le foot qu’il lui dédia très tôt un ballet. Il compose “L’Age d’Or” dès 1928, à l’âge de 22 ans. La pièce sera jouée pour la première fois le 26 octobre 1930 au théâtre du Kirov, dans sa ville natale de Leningrad. L’œuvre raconte l’histoire d’une équipe soviétique de football en tournée dans un pays occidental. Elle serait inspirée d’un voyage de l’équipe du Dynamo Moscou en Europe dans les années 1920.

Le message de ce ballet est évidemment de flatter les vertus du communisme face aux travers de la société occidentale. Chostakovitch crée alors des caricatures de personnages occidentaux grotesques et plutôt abjects lesquels s’en prennent violemment aux gentils footballeurs communistes.

On n’utilise donc pas le foot pour porter un message de paix, bien au contraire. Les joueurs soviétiques, victimes de toutes sortes de fourberies, se retrouvent derrière les barreaux (injustement, bien entendu). Ils seront bien vite libérés par des ouvriers locaux qui amorcent une révolte contre le capitalisme. Le ballet se termine par une danse où footballeurs et ouvriers communient main dans la main dans le meilleur des mondes.

Musiques interdites

La grande originalité de ce ballet est d’avoir intégré aux mélodies traditionnelles des musiques occidentales comme le jazz ou la musique de cabaret, ainsi que des danses officiellement interdites par le pouvoir communiste, comme le Fox-Trot ou le French Cancan. Sensés illustrer la décadence des pays de l’Ouest, ces éléments vont rencontrer un franc succès auprès du public russe, au point que la pièce sera interdite après seulement dix-huit représentations.

Il faudra attendre plus de cinquante ans pour que le ballet soit rejoué, bien après la mort de son auteur en 1975. Le librettiste Iouri Grigorovitch et le cinéaste Isaak Glikman réécrivent “L’Âge d’Or” en 1982 en retirant les éléments indésirables et en y intégrant d’autres morceaux de Chostakovitch. La première est jouée au Bolchoï de Moscou le 4 novembre 1982. Une autre version sera montée en 1983 par le danseur Irek Moukhamedov, puis en 2006 par le dramaturge Konstantin Outchitel.

A propos de Dmitri Chostakovitch, de l’Union Soviétique et de l’Âge d’Or

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