Retour à Séville

France-RFA 1982 Séville

LIVRE – On a tous un compte à régler avec Séville. Pierre Louis Basse, journaliste et écrivain, a couché le sien sur papier. C’était en 2005, vingt trois ans après les faits…

Tu me jettes, tu me quittes, pas de quoi se jeter d’une tour,
Après tout, ça m’évite d’avoir à te jeter un jour.
J’ai porté des poids plus lourds, j’ai eu des astres plus désastreux,
Des deuils et des crashs d’amour, des instants plus douloureux,
Comme France-Allemagne 82…
.
(Bartone, France-Allemagne 82, 2005)

Comme Bartone, tous ceux qui ont vécu la rencontre France-Allemagne de 1982 ont un compte à régler avec ce match si particulier. Bien des années après, on cherche toujours à comprendre comment la France a pu perdre un tel match, comment l’arbitre a-t-il pu voir la faute grossière du gardien sans songer à l’exclure, comment une équipe de RFA à la dérive a-t-elle pu remonter une partie si mal embarquée…

Epinay-sur-Orge

Pierre-Louis Basse, journaliste et écrivain est revenu, vingt-trois ans après, sur ce match si particulier : “Je me doutais bien, il y a quelques mois déjà, que cette affaire se terminerait par la défaite de l’équipe de France. Je n’avais pas franchement réalisé à quel point le fait de vouloir maintenir la même musique jusqu’au bout, jusqu’à en mourir, avait finalement privé cette génération d’artistes d’une finale de Coupe du Monde. A force de les voir jouer, de les entendre, de les revoir aussi, je me suis progressivement débarrassé de mon chagrin de Séville. Comme si, près de vingt-cinq ans après ma colère dans le jardin d’Epinay-sur-Orge, je venais enfin de comprendre les raisons de cette défaite.

Pierre-Louis Basse a écrit de nombreux ouvrages sur le football, sur le sport et sur l’histoire. Il est l’auteur notamment de deux romans très remarqués, “Guy Môquet, une enfance fusillée” (2000) et “Ma ligne 13“. Il prête également sa plume pour “Un rêve modeste et fou“, autobiographie de Eric Cantona.

France-RFA 1982 est un match à part de l’histoire du football. Il semble s’être disputé au delà du tournoi dont il constituait quand même une demi-finale. C’est un match qui surtout, n’a pas de morale. La meilleure équipe sur le terrain est celle qui a perdu. C’était déjà le cas quelques jours plus tôt lorsque le Brésil, superbe favori du Mondial 1982, s’était fait sortir par la mesquine Italie. Le public s’était à peine remis de cette déception que Séville allait enfoncer le clou un peu plus.

Le match d’un siècle

C’est un match qui semble avoir duré un siècle. Jamais un match de Coupe du Monde ne s’était clos sur une série de tirs au but. Il s’est passé toutes sortes d’événements hors norme. D’abord quelques buts superbes : la reprise de volée pure de Marius Trésor en début de prolongations, le ciseau retourné de Klaus Fischer qui remet les deux équipes à 3-3. Des occasions à foison : le coup franc sur la barre de Paul Breitner, en tout début de match, et tout à la fin, le tir lointain de Manuel Amoros qui s’écrase sur la même barre. Des événements inédits : les tirs au but, donc, mais aussi cette faute invraisemblable du gardien allemand sur Patrick Battiston, une attaque d’une violence inouïe… et aucune réaction de l’arbitre, pas de carton rouge, ni jaune, même pas le moindre coup-franc. Enfin, une image symbole, la joie délirante du très posé Alain Giresse, qui inscrit le troisième but, persuadé d’avoir qualifié son équipe pour la finale.

Ce match a donc duré un siècle tellement on l’a rejoué sans en trouver l’explication. L’équipe de France a perdu, mais jamais l’équipe de France n’a été aussi grande que ce soir-là. Même l’équipe qui a remporté la Coupe du Monde en 1998 ne pourra être aussi grande que celle qui a perdu en 1982.


A propos de Pierre-Louis Basse et de France-RFA 1982

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